Cette page comporte quelques textes bien particuliers auxquels je suis tout particulièrement attaché. Ils sont ordonnés dans l’ordre chronologiques où je les ai découverts.
John de Yves Duteil. Une K7 qu’on m’avait offert quand j’étais gosse.
Champagne de Jacques Higelin.
La Complainte de la Blanche Biche. Air traditionnel entendu sur l’album Suite Galaise de Tri Yann. Une chanson qui m’a particulièrement bousculé l’imagination.
Fiche Anthropométrique de Jacques Higelin sur l’album AÏ Cette chanson m’avait inspiré une idée de scénar que je n’ai jamais eu le courage de monter. Trop de boulot, et pourtant… quel scénar !
Alligators 427 : de Hubert Félix Thiéfaine. C’est vrai que ça sonne plutôt post-apocalyptique que médiéval-fantastique mais bon… J’ai quand même une créature immonde surgie droit des délires infernaux inspirés par cette chanson.
Out from the Deep : sur l’album « Cross of Changes » d’Enigma. Inspiration particulière pour un peuple qui à beaucoup souffert.
Come By the Hills : découverte sur l’album « Elemental » de Loreena Mc Kennitt. Une chanson traditionnelle dont on pourrait jurer qu’elle a été écrite pour le jeu de rôle.
Leaf by Niggle (Extrait) : Les dernières lignes de la nouvelle ‘’Feuille de Niggle’’ de J.R.R. TOLKIEN. Cette nouvelle fut lue lors d’un service donné en sa mémoire quelques semaines après sa mort. On peut la lire dans son livre ‘’Faerie’’ Elle laisse à penser que tout « créateur de monde » est appelé à y vivre après sa mort.
Irradié : de Jacques Higelin, sur l’Album « No man’s Land. »
Adolescent : de Jacques Higelin, sur l’album « Aux Héros de la Voltige. »
Maïawella : de Tri Yann, sur l’Album « Le Pelegrin. » Un personnage haut en couleur, tout feu tout flamme.
L’Or de Ludovic Syffert sur l’album « une heure déjà » du groupe Mes Souliers Sont Rouges. Une fièvre qui touche bien des aventuriers…
John
John était amoureux, ça se voyait un peu.
Il avait un air si bizarre et veillait si tard.
Il buvait tant de vin que souvent, le matin,
On pouvait l’entendre de l’étang jusqu’au moulin.
La fille aux longues mains ne disait jamais rien,
Et le pauvre John pensait bien
Qu’à veiller dehors jusqu’au lever du jour,
Il en crèverait ou bien de froid ou bien d’amour.
John avait un béguin, ça se voyait un brin.
Quand il tapait sur sa poitrine en buvant du gin,
Il avait l’œil hagard, buvait toujours à part,
Poussait des hurlements qui faisaient fuir le vent.
Mais la fille aux longues mains ne disait jamais rien,
Et le pauvre John pensait bien
Qu’à veiller dehors jusqu’au lever du jour,
Il en crèverait ou bien de froid ou bien d’amour.
John était amoureux, il en a fait l’aveu.
Depuis, de la rivière au port, on en rit encore.
Le soir, au coin du feu, on écoute les vieux
Raconter l’histoire de John l’amoureux.
Il aimait la statue d’une belle inconnue
Morte cent ans auparavant dans un ouragan.
Il allait tous les jours lui dire son amour,
Et noyait sa peine dans un verre à son retour.
La fille aux longues mains ne dirait jamais rien,
Et le pauvre John savait bien
Que dans la statue était son cœur et qu’un jour
Il en crèverait ou bien de froid ou bien d’amour,
Que dans la statue était son cœur et qu’un jour
Il en crèverait ou bien de froid ou bien d’amour,
Yves Duteil
Champagne
La nuit promet d’être belle
Car voici qu’au fond du ciel
Apparaît la lune rousse
Saisi d’une sainte frousse,
Tout le commun des mortels
Croit voir le Diable a ses trousses
Valets volages et vulgaires,
Ouvrez mon sarcophage
Et vous pages pervers
Courez au cimetière
Prévenez de ma part
Mes amis nécrophages
Que ce soir nous sommes attendus
Dans les marécages.
Voici mon message
Cauchemars, fantômes et squelettes,
Laissez flotter vos idées noires
Près de la mare aux oubliettes,
Tenue de suaire obligatoire.
Lutin, lucioles, feu-follets,
Elfes faunes et farfadets
Effraient mes grand carnassiers,
Une muse un peu dodue
Me dit d’un air entendu
Vous auriez pu vous raser
Comme je lui fais remarquer
Deux, trois pendus attablés
Qui sont venus sans cravate
Elle me jette un œil hagard
Et vomit sans crier gare
Quelques vipères écarlates.
Vampires éblouis
Par de lubriques vestales,
Égéries insatiables
Chevauchant des valkyries,
Infernale appétit de frénésies bacchanales
Qui charment nos âmes envahies par la mélancolie.
Envoi
Satyres joufflus, boucs émissaires,
Gargouilles émues, fières gorgones;
Laissez ma couronne aux sorcières
Et mes chimères a la licorne.
Soudain les arbres frissonnent
Car Lucifer en personne
Fait une courte apparition,
L’air tellement accablé
Qu’on lui donnerait volontiers
Le bon dieu sans confession
S’il ne laissait malicieux
Courir le bout de sa queue
Devant ses yeux maléfiques
Et ne se dressait d’un bond
Dans un concert de jurons
Disant d’un ton pathétique
Que les damnés obscènes
Cyniques et corrompus
Fassent griefs de leurs peines
A ceux qu’ils ont élus
Car devant tant de problèmes
Et de malentendus,
Les dieux et les diables en ont venus
A douter d’eux-mêmes
Au dédain suprême,
Mais déjà le ciel blanchit,
Esprits je vous remercie
De m’avoir si bien reçu.
Cocher lugubre et bossu,
Déposez-moi au manoir
Et lâchez ce crucifix,
Décrochez moi ces gousses d’ail
Qui déshonorent mon portail
Et me cherchez sans retard
L’ami qui soigne et guérit
La folie qui m’accompagne
Et jamais ne m’a trahi
Champagne !
Jacques Higelin
La Complainte de la Blanche Biche
Celles qui vont au bois c’est la mère et la fille
La mère va chantant et la fille soupire.
Qu’avez vous à soupirer, ma blanche Marguerite ?
J’ai bien trop d’ire en moi et n’ose vous le dire.
Je suis fille le jour et la nuit blanche biche
La chasse est après moi, les barons et les princes.
Et mon frère Renaud qui est encore le pire,
Allez, ma mère, allez bien promptement lui dire
Qu’il arrête ses chiens jusqu’à demain midi.
Ou sont tes chiens, Renaud et ta chasse gentille ?
Ils sont dedans le bois, accourent blanche biche.
Arrête les, Renaud, arrête, je t’en prie !
Trois fois les a cornés de son cornet de cuivre;
A la troisième fois la blanche biche est prise.
Mandons le dépouilleur qu’il dépouille la biche !
Celui qui la dépouille dit « je ne sais que dire ! »
Elle a les cheveux blonds et le sein d’une fille !
A tiré son couteau, en quartiers il l’a mise.
En ont fait un dîner aux barons et aux princes.
Nous voici tous sieds hors ma sœur Marguerite.
Vous n’avez qu’à manger, suis la première assise
Ma tête est dans le plat et mon cœur aux chevilles
Mon sang est répandu par toute la cuisine
Et sur vos noirs charbons, Mes pauvres os s’y grillent
Traditionnel
Fiche Anthropométrique
De face, de dos, de trois quart et de profil
Les mains sur le capot, car de flic en double file
Contrôle d’identité
Pas d’passeport, pas d’papiers
Fiche anthropométrique
Simple formalité
De face, de dos, de trois quart et de profil
La peau sur les os, la vie ne tient qu’à un fil
Signe particulier
Le regard paniqué
Fiche anthropométrique
Simple formalité
De face, de dos, de trois quart et de profil
Pas d’traces, pas d’pot
Sans boulots ni domicile
Fiche anthropométrique
Simple formalité
Laisse-moi rigoler…
Jacques Higelin
Alligators 427
Alligators 427
Aux ailes de cachemire safran,
Je grille ma dernière cigarette.
Je vous attends.
Sur cette autoroute hystérique
Qui nous conduit chez les mutants,
J’ai troqué mon cœur contre une trique.
Je vous attends.
Je sais que vous avez la beauté destructive
Et le sourire vainqueur jusqu’au dernier soupir.
Je sais que vos mâchoires distillent l’agonie.
Moi je vous dis : « bravo » et « vive la mort ! »
Alligators 427
À la queue de zinc et de sang,
Je m’tape une petite reniflette.
Je vous attends.
Dans cet étrange carnaval
On a vendu l’homo sapiens
Pour racheter du Neandertal.
Je vous attends.
Et les manufactures ont beau se recycler,
Y aura jamais assez de morphine pour tout le monde,
Surtout qu’à ce qu’on dit, vous aimez faire durer.
Moi je vous dis : « bravo » et « vive la mort ! »
Alligators 427
Aux longs regards phosphorescents,
Je mouche mon nez, remonte mes chaussettes.
Je vous attends.
Et je bloque mes lendemains.
Je sais que les mouches s’apprêtent,
Autour des tables du festin.
Je vous attends.
Et j’attends que se dressent vos prochains charniers.
J’ai raté l’autre guerre pour la photographie.
J’espère que vos macchabées seront bien faisandés.
Moi je vous dis : « bravo » et « vive la mort ! »
Alligators 427
Aux crocs venimeux et gluants,
Je donne un coup de brosse à mon squelette.
Je vous attends.
L’idiot du village fait la queue
Et tend sa carte d’adhérent
Pour prendre place dans le grand feu.
Je vous attends.
J’entends siffler le vent au-dessus des calvaires
Et je vois les vampires sortir de leurs cercueils
Pour venir saluer les anges nucléaires.
Moi je vous dis : « bravo » et « vive la mort ! »
Alligators 427
Aux griffes d’or et de diamant,
Je sais que la ciguë est prête.
Je vous attends.
Je sais que dans votre alchimie,
L’atome ça vaut des travellers chèques
Et ça suffit comme alibi.
Je vous attends.
A l’ombre de vos centrales,
Je crache mon cancer.
Je cherche un nouveau nom pour ma métamorphose.
Je sais que mes enfants s’appelleront vers de terre.
Moi je vous dis : « bravo » et « vive la mort ! »
Alligators 427
Au cerveau de jaspe et d’argent,
Il est temps de sonner la fête.
Je vous attends.
Vous avez le goût du grand art
Et sur mon compteur électrique,
J’ai le portrait du prince-ringard.
Je vous attends.
Je sais que, désormais, vivre est un calembour.
La mort est devenue un état permanent.
Le monde est aux fantômes, aux hyènes et aux vautours.
Moi je vous dis : « bravo » et « vive la mort ! »
Hubert Félix Thiéfaine
Out From the Deep
We came out from the deep
to help and understand but not to kill
It takes many lives till we succeed
to clear the debts of many, many hundred years.
Enigma
Come By the Hills
Come by the hills to the land
where fancy is free
And stand where the peaks meet the sky
and the rocks reach the sea
Where the rivers run clear
and the bracken is gold in the sun
And cares of tomorrow must wait
till this day is done.
Come by the hills to the land
where life is a song
And sing while the birds fill the air
with their joy all day long
Where the trees sway in time,
and even the wind sings in tune
And cares of tomorrow must wait
till this day is done.
Come by the hills to the land
where legends remain
Where stories of old stear the heart
and may yet coime again
Where the past has been lost
and the future is still to be won
And cares of tomorrow must wait
till this day is done.
Come by the hills to the land
where fancy is free
And stand where the peaks meet the sky
and the rocks reach the sea
Where the rivers run clear
and the bracken is gold in the sun
And cares of tomorrow must wait
till this day is done.
Traditionnel
Leaf By Niggle
(Extrait)
Devant lui se dressait l’Arbre, son Arbre terminé. Si on peut dire cela d’un arbre vivant, dont les feuilles s’ouvraient, dont les branches poussaient et se courbaient au vent que Niggle avait si souvent sent, supposé, et qu’il avait si souvent manqué de saisir. Il regardait l’Arbre, et lentement il leva les bras et les ouvrit largement. « C’est un don ! » dit il.
John Ronald Reueld Tolkien
Irradié
Irradié, voyageur immobile
Irradié, je suis le sage, le fou, le débile,
Je suis du village l’idiot
Et j’entends les rumeurs de la ville
J’entends les passages cloutés berçant les piétons sages
Au rythme des feux verts dans le désert des embouteillages
Irradié, voyageur immobile
Irradié, je suis, le sage le fou, le débile,
Je suis du village l’idiot
Et j’entends les rumeurs de la ville
Compagnon des lézards obscènes, je déjeune à minuit
De girafes rôties qui battent encore de l’aile
Sous le menton crochu des sorcières malsaines
Irradié, voyageur immobile
Irradié, je suis, le sage, le fou, le débile,
Je suis du village l’idiot
Et j’entends les rumeurs de la ville
Je suis celui qu’on veut celui qu’on croit
Celui qu’on voit danser sur les nuages bleus
Tirant des cordes de ma lyre des sons hallucinants
Qui font bondir les petits du tapir au fond des entonnoirs
Les soirs où sur eux s’abattent, fièvres et cauchemars
Je suis la Dame en Noir, l’Elfe tout blanc
Je suis, je suis, le placide éléphant
Qui, balançant sa trompe à travers la futaie
Bouffe en rêvant les enfant du St Honoré
Connaissez vous la druidesse, la fée
Qui d’un coup de baguette, d’un abracadabra
Fera de moi, l’éternelle âme en peine ?
Un incarné suant
Moi, conquérant du vide
Je lance mes escouades d’éclairs, de brumes et de mirages
A l’assaut des galaxies…
Jacques Higelin
Adolescent
Adolescent qui tend l’oreille
Aux divagations de ton fou,
J’aimerais parfois les nuits de veille
T’offrir un siège au fond de mon trou.
Nous débattrons des mœurs en chine
Sous les dynasties de Tsin et Tchou
Tout en dégustant le strychnine
Préparée par mon loup-garou.
Nous débattrons des mœurs en chine
Sous les dynasties de Tsin et Tchou
En observant de la cuisine
Le détalement strident des rats.
Quand ils se voient la première fois dans les miroirs de mes Ray-ban…
Jacques Higelin
Maïawela
Refrain :
Chantons la belle Maïawela,
Rouge robe de noçailles de Roy.
Elle prit naissance dans les fleurs d’un chesne
Croise de geneste et de verne,
Elle blanchit la nublèce de son éclat,
Elle est anguille beaucoup plus que cobra.
Refrain
Elle faist synfonie de flûte d’un pâtre,
Faille vive de bois vert dans l’astre,
Tient aulberge à vinée plus douce qu’en Arbois,
Faist aux jacquets hostellerie de ses draps.
Refrain
Elle est d’estranges et d’éstrangères rives,
Sa cavale mil cavaliers suivent,
Elle impose triève dans les tornois,
A Lucifer de chanter Alleluya !
Refrain
A l’estranger offre ses poires blanches,
Plus sucrées que pomes d’orenge ;
Elle tresjète la neige dessous ses pas
Et faist velours des ronceries sous ses doigts.
Refrain
Elle a chainsil tissé d’ailes d’abeilles
Panier d’or enclos de dentèle,
Faist chaline, ventelet, tempeste de son choix,
Froider le froid, brusler l’encens d’Angora.
Refrain
Tri Yann
L’Or
L’encre n’a pas séché au cœur des parchemins
Les feuilles volent sans fin, toutes ces cartes et ces routes suivies la peur au ventre
Et cette rage au cœur
… L’or …
Raison perdue au bout, et quoi qu’il nous en coûte
Elle a tout effacé, le goût salé du sang, le goût amer des larmes
Jusqu’à l’odeur des cendres
Refrain
Encore un autre monde, plus loin quoi qu’il arrive
Sans un horizon
L’envie la folie, perdus, quoi qu’il arrive
Rien ne compte… que la soif
A l’ombre de nos croix, nous avons marché
Et conquis l’inconnu, d’une forêt à l’autre, d’une montagne à l’autre
Et qu’il ne reste plus
… Que la soif …
Et nos encres ont taché les blancs des parchemins
Sur nos traces ont poussé d’autres rêves, d’autres routes, en dépit de tout
La fièvre brûle encore.
… L’or …
Refrain
Encore un autre monde, plus loin quoi qu’il arrive
Sans un horizon
L’envie la folie, perdus, quoi qu’il arrive
Rien ne compte….
Encore un autre monde, plus loin quoi qu’il arrive
Sans un horizon
L’envie la folie, perdus, quoi qu’il arrive
Rien ne compte…
Ludovic Syffert